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Sénégal : le front social en ébullition


Rédigé le Mercredi 4 Mai 2022 à 11:36


A trois mois des élections législatives si la classe politique est dans l’effervescence du parrainage et des investitures, le front social lui est en ébullition, marqué par la flambée des prix des denrées de première nécessité, la rareté de certains produits, mais aussi et surtout par une crise persistante du secteur de la santé.

Un secteur de la santé qui a fini d’être mis à nue, dans toutes ses composantes : équipement, personnel, qualité de service, rien ne va plus dans ses hôpitaux désormais considérés comme des mouroirs.

L’affaire Astou Sokhna, du nom de cette dame qui a perdu la vie, pour ne pas avoir été prise en charge à l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye, a levé le lièvre et suscité une très forte indignation populaire, pour aboutir à la mise en accusation et l’arrestation des 4 sages-femmes de garde à l’hôpital ce soir-là.


Une arrestation qui a soulevé l’ire de la corporation, et les différents syndicats dont le Collectif des Travailleurs de la Santé et de l’Action Sociale (CTSAS), le Syndicat Autonome des Médecins du Sénégal(SAMES) lesquels mènent des mouvements d’humeur depuis l’éclatement de l’affaire. Ils seront rejoints par le Collectif des Médecins pharmaciens dentistes en spécialisation (COMES). 

 En décrétant une journée sans accouchement, en réaction à l’arrestation de leurs collègues, les blouses blanches ont choisi l’extrême et frôlé l’indécence. Une réaction disproportionnée qui a radicalisé les usagers du service public de la santé dans une série de manifestations qui a abouti à l’emprisonnement des sages-femmes de Louga, dont on se demande si elles sont vraiment sages ! 
Nous sommes donc, dans une indescriptible situation de profond malaise, ou la santé est entre les feux des usagers, des praticiens et de l’Etat. Un malaise accentué par la mort de Penda Sall par hémorragie massive, à cause d’une pénurie de sang. Et, oh coïncidence ! Toujours à l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga. 

L’état doit rapidement trouver des solutions au secteur de la santé, au lieu de se contenter de réprimer un personnel fautif, et de saupoudrer la corporation d’augmentation de leur traitement. Le mal est profond, si profond qu’à l’hôpital Aristide Le Dantec, d’éminents et dévoués professeurs en arrivent à demander à leurs patients, non sans un pincement au cœur, s’ils ont amené la compresse pour leur pansement. Ridicule.  

Selon le Pr Youssou Ndiaye, ancien directeur d’hôpital « Malgré les lois sur la décentralisation, et la réforme hospitalière, la gestion du secteur sanitaire public reste encore très centralisée, peu motivante, incohérente et très bureaucratique ». Avant de conclure sa pertinente analyse par le constat d’un échec de l’état dans la mise en œuvre de la réforme hospitalière. 
La pertinence et l’efficacité d’une carte sanitaire, ne s’apprécie pas uniquement à l’aune des infrastructures réalisées. Surtout lorsque celles-ci sont sous équipées, sans personnel qualifié, ni médicaments.  

Il s’y ajoute que le personnel sanitaire est mal rémunéré, travaille sous pression à défaut d’un effectif suffisant, et n’est pas suffisamment pourvu en équipements techniques, pour offrir un plateau sanitaire digne de ce nom. 

La Coalition pour la Santé et l’Action Sociale (COSAS), offrant sa médiation dans la crise du secteur, préconise « une évaluation prospective rigoureuse du système de santé et la mise en œuvre systématique des mesures correctrices ». 

La crise du secteur de la santé est symptomatique des choix erratiques du pouvoir dans l’ordonnancement des priorités, et donne raison aux détracteurs du président Macky Sall, qui lui reprochent d’avoir un mauvais sens des priorités des préoccupations du peuple. 

Sous d’autres cieux des ministres ont démissionné pour moins que ça, au moment où Abdoulaye Diouf Sarr trône depuis des lustres à la tête de ce ministère, lui qui a été viré par ses administrés de la commune de Yoff et rejeté par les Dakarois pour la mairie de la Ville. Aucune responsabilité n’est engagée. 

Pendant ce temps, la coordination des étudiants de Saint Louis (Cesl) qui ne décolère pas, tient un sit-in devant le bureau du Recteur de l’UGB, pour exiger son départ et celui du Directeur du CROUS, pour incompétence. Selon les dirigeants de la Cesl, malgré un budget de plus de dix milliards, le rectorat est incapable d’investir dans l’augmentation des capacités d’accueil et d’hébergement au campus social. 

Les activistes de la société civile ne sont pas en reste, puisque le Collectif pour la libération de Cheikh Omar Diagne(COLICOD) qui regroupe des mouvements de la société civile, des activistes et les guides religieux avait annoncé une manifestation pour le mercredi 27, laquelle sera finalement interdite par le préfet de Dakar, soulevant ainsi leur courroux. 

Si une telle situation est mise en rapport avec les dossiers judiciaires pendants et impliquant des leaders politiques, avec le refus catégorique du parrainage et la radicalisation des différents camps politiques, alors, il est à craindre des jours de fortes turbulences à venir. 
 
Samba Moussa LY 
 












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